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Russie - Le système médical s'effondre à Moscou

 Des milliers de médecins russes licenciés, des dizaines d'hôpitaux fermés à Moscou: une réforme controversée a mis dans la rue les médecins russes qui craignent l'effondrement du secteur menacé par de sévères coupes budgétaires.
Par dessus leurs manteaux d'hiver, les médecins ont revêtu leurs blouses blanches. Ils étaient près de 6000, médecins et infirmiers moscovites, à braver le froid un dimanche de novembre pour protester contre les réformes entreprises par la mairie de Moscou.
En cause: les licenciements annoncés de plus de 7000 médecins et la fermeture de 28 hôpitaux et cliniques d'ici quelques mois, selon des documents divulgués par la presse russe.
«Nous avons besoin d'une réforme, mais pas menée d'une façon aussi catastrophique», s'insurge Piotr, un docteur de 29 ans qui faisait partie des manifestants et qui préfère rester anonyme par peur d'être licencié lui aussi.
«A l'origine, cette réforme a été voulue par (le président russe Vladimir) Poutine pour calmer les médecins et la classe moyenne qui avait manifesté contre sa réélection. Eh bien, c'est raté !», juge-t-il.
800 euros par mois
La réforme du secteur médical, qui doit entrer en vigueur le 1er janvier 2015, fait partie des premiers décrets signés par Vladimir Poutine après avoir été réélu en mai 2012, malgré une campagne électorale émaillée par les manifestations de l'opposition.
Parmi ses directives phares, l'une prévoit de doubler les salaires du personnel médical, dont le niveau moyen national est très faible comparés à leurs homologues européens: 45'000 roubles pour un docteur (800 euros) et 26'000 roubles pour un aide-soignant (460 euros).
Pour autant, le Fonds d'assurance obligatoire (OMS), chargé selon la réforme de financer les hôpitaux et leurs employés, devrait voir son budget se contracter de 15% d'ici à 2015. A Moscou cette baisse atteint les 18%, selon le quotidien financier RBK.
«On ne donne pas les moyens financiers à la réforme: du coup, il faut réduire le nombre de médecins concernés», explique Ioulia Nisnievitch, spécialiste du secteur médical et professeur à la Haute École d'Économie de Moscou.
Médecins mis sous pression
Selon RBK, la réforme vise à rendre les hôpitaux et cliniques autonomes: chaque établissement ne dépenserait que ce qu'il gagne. L'état pour sa part prendrait en charge les achats de matériel médical au-dessus de 100'000 roubles (5600 euros).
«L'objectif de la réforme, c'est de rentabiliser au maximum le travail du personnel médical», remarque le journal.
Pour Maria S., pédiatre dans un des plus grands hôpitaux de Moscou, cela se traduit par une «très forte pression sur les médecins».
«Le chef de ma clinique nous a demandé à chacun de ne plus traiter 20 patients par jour, mais 50. Même si je travaille comme une forcenée, cet objectif est surréaliste», s'inquiète Maria qui n'est pas allée manifester «à cause des menaces de sa direction» mais qui souligne les «graves conséquences sur la qualité des soins».
Une inquiétude partagée par le président du Comité de la Santé à la Douma, Sergueï Kalachnikov: «L'accès aux soins a baissé brusquement ces dernières années à Moscou», a-t-il dénoncé, cité par l'agence de presse russe TASS.
Une réforme «nécessaire»
Pour le responsable du Département de la santé à la mairie de Moscou, Leonid Petchatnikov, la réforme est «nécessaire et vitale».
Sur les ondes de la radio Ekho Moskvy, le fonctionnaire, qui s'est lancé dans un marathon d'interviews pour rassurer les médecins, explique qu'elle permettra aux hôpitaux de devenir des centres multispécialisés, pour le bien des patients.
Dans certains hôpitaux moscovites, explique-t-il, il faut mettre le patient dans une ambulance et l'envoyer dans un autre hôpital pour qu'un chirurgien puisse l'opérer.
Olga Demitchiova, docteur moscovite devenue la porte-parole des médecins depuis sa mise en ligne d'une vidéo où elle interpelle Vladimir Poutine, estime elle aussi que «la réforme est plus indispensable que jamais».
«Mais M. le Président, (les députés chargés de la réforme) vous donnent des faux chiffres et des mesures bancales», accuse-t-elle. «Je comprends que les Jeux olympiques (d'Hiver), la Crimée ont coûté cher mais ne vous rattrapez pas en économisant des vies humaines».
Pour Iouli Nisnievitch, la grogne des médecins risque de se généraliser.
«Tôt ou tard, les manifestations vont devenir massives, si cela continue. C'est une grave menace pour l'Etat, et il ne peut l'apaiser en distribuant de l'argent, car il n'a plus d'argent», assure-t-il.
Les médecins moscovites ont annoncé qu'ils manifesteront à nouveau le 29 novembre.
Vidéo de la manifestation au début novembre
Freedom1

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