Quelque part en Afrique, des villageois se lèvent contre l’exploitation pétrolière et ses destructions. L’écrivaine américaine d’origine camerounaise signe un intense deuxième roman, après « Voici venir les rêveurs », en 2016.
Encore inconnue il y a seulement cinq ans, Imbolo Mbue, 38 ans, était attendue pour ce deuxième roman. Le premier, Voici venir les rêveurs (Belfond, 2016), avait fait l’objet d’une bataille entre éditeurs que remporta Random House pour un million de dollars. L’écrivaine d’origine camerounaise, américaine depuis 2014, y orchestrait avec mordant les funérailles du rêve américain sur fond de crise des subprimes, à travers l’emprise d’un nanti déchu de Wall Street sur son chauffeur immigré camerounais. Changement de décor, mais pas d’ambiance. Puissions-nous vivre longtemps nous convie à l’enterrement des habitants de Kosawa, un village fictif, en Afrique, à la fin des années 1970. C’est du moins ce que l’on croit en abordant ce récit.
« Nous mourions », constatent « les enfants », l’une des voix de ce roman polyphonique. Sous le vénérable manguier, ils écoutent les boniments des « gens de Pexton », l’entreprise américaine qui fore leur sol depuis un demi-siècle. A leurs grands-parents, ces gens avaient promis « civilisation » et « prospérité », des notions intraduisibles dans leur langue. Les aïeux étaient retournés chasser et pêcher, refusant de « perdre la main sur leur vie » en s’employant dans les champs de pétrole. Las. Depuis lors, les fuites des pipelines ont rendu leurs terres stériles, les plantes médicinales mortelles, et leur fleuve, autrefois nourricier, mortifère.
Le pouvoir de détruire un monde
Avec ce face-à-face, Imbolo Mbue s’attache une nouvelle fois à dépeindre une relation d’assujettissement. Les villageois n’existent pas aux yeux des « gens de Pexton ». Eux seuls détiennent la maîtrise du temps, le pouvoir de détruire un monde. Si le roman assume d’emblée l’héritage de Tout s’effondre (1958 ; Actes Sud, 2013), le livre culte du Nigérian Chinua Achebe (1930-2013)..
« Puissions-nous vivre longtemps » (How Beautiful We Were), d’Imbolo Mbue, traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Catheribe Gibert, Belfond, 432 p., 23 €, numérique 14 €.
Par Gladys Marivat - Monde des livres
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