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France : Sting chante au Bataclan pour "célébrer la musique et la vie",généreux, digne et sans pathos

La star a donné le premier concert dans la salle parisienne depuis les attentats du 13 novembre 2015. Une prestation pleine de dignité qui a valeur d'exorcisme.


12 novembre 2016. Un samedi soir sur la Terre. Emprunter la ligne 9 du métro. Sortir à la station Oberkampf. Se diriger vers le n°50 du Boulevard Voltaire. Reprendre le chemin du Bataclan, la boule au ventre.  
On pense à Thomas et tous ceux qui, le 13 novembre 2015, ont sans doute suivi le même itinéraire pour aller assister à un concert des Eagles of Death Metal mais ne sont jamais rentrés chez eux. 

Montrer patte blanche

Presque un an jour pour jour après cette nuit tragique, la salle parisienne de 1500 places rouvre ses portes. Pour y accéder, il faut montrer patte blanche: franchir un barrage de police, deux contrôles de billets, une fouille, passer devant de nombreuses caméras et des micros tendus. A l'intérieur, tout a été changé mais le Bataclan n'a pas changé. 
La peinture, le toit, le parquet sont neufs. Le bar est toujours à gauche en entrant. On avait simplement oublié ces fresques sur les côtés, aujourd'hui si bien mises en lumière. Le petit jeu des différences permet de tromper l'appréhension et de ne pas se laisser gagner par de tristes pensées. L'ambiance est presque celle d'un concert normal. L'assemblée papote, les bières défilent. En fond sonore, Otis Redding, Percy Sledge...  
Dans le public, on aperçoit Claire Chazal, Marc-Olivier Fogiel, Jeanne Cherhal, la ministre de la Culture Audrey Azoulay. Les cameramen, eux, font leurs derniers réglages. Le concert le plus attendu de l'année est retransmis dimanche sur France 2, à 00h55, et lundi 14 novembre sur France 4, à 22h50. 
Célébrer la vie, la musique
L'idée d'une candidature opportuniste peut traverser les esprits, mais on ne peut pas reprocher à l'ex-Police de manquer de courage. Car la mission est délicate.


Le chanteur la résume lui-même, en français, en montant sur scène à 21h06: "Ce soir nous avons deux tâches importantes à concilier. D'abord se souvenir, honorer ceux qui ont perdu la vie dans les attaques d'il y a un an. Ensuite, célébrer la vie, la musique que représente cette salle de spectacle historique. Avant de commencer, j'aimerais que nous observions une minute de silence. Ne les oublions pas." 
Accompagné de ses musiciens et du trompettiste franco-libanais Ibrahim Maalouf, l'artiste entame ensuite la soirée par un titre datant de 1987, Fragile, dont les paroles sonnent juste ce soir: "On and on the rain will fall/ Like tears from a star like tears from a star/ On and on the rain will say / How fragile we are how fragile we are / How fragile we are how fragile we are" (Encore et encore la pluie / Comme des larmes d'étoiles, comme des larmes d'étoiles / Pour toujours, elle nous rappellera / A quel point nous sommes fragiles, à quel point nous sommes fragiles). 
T-shirt moulant sur muscles tendus, Sting, 65 ans, attrape sa basse et ouvre Message in the Bottle, l'un des nombreux tubes de Police. C'est bien les tubes. Ils contiennent une pommade efficace pour panser les plaies. 
Le public chante à l'unisson, comme une respiration. Sting enchaîne avec le premier morceau de son nouvel album, le très pop-rock, I can't stop thinking about you, puis One find Day. Il introduit la chanson suivante, 50 000, en rendant hommage aux artistes décédés cette année, de David Bowie à Leonard Cohen.  
Vive le Bataclan!
On assiste à un concert, un vrai, généreux, digne et sans pathos. La star déroule son disque: l'empathique Inshallah, "un mot qui est une marque d'humilité, de courage et d'espoir" qui évoque la crise des migrants, le rapide Petrol Head... La rock star relance avec des classiques, Every breath you takeEnglishman in New YorkDesert Rose et ses sonorités orientales, So lonely... La prestation a valeur d'exorcisme. Les spectateurs - 500 rescapés ou familles de victimes ont été invités par la production - dansent, chantent, se prennent par la main. 
La star entonne Roxanne, "une chanson écrite à Paris en 1978", fondue avec le Ain't no sunshine de Bill Withers, invite sur scène le français Henri Padovani, premier guitariste de Police, pour Next To You
A 22h31, les musiciens laissent Sting seul avec sa guitare. L'image du journaliste James Foley, tué en Syrie en 2014, est projetée derrière lui. Sa mort lui a inspiré Empty Chair, qu'il dédie à toutes les victimes. Un frisson parcourt les échines. Les dernières notes s'évanouissent. Sting lance: "Vive le Bataclan!". Les terroristes n'ont pas tué Charlie, ils n'ont pas non plus eu la peau du Bataclan. 

Le chanteur des Eagles of Death Metal refoulé à l'entrée

Ce soir, Sting a la lourde charge de ramener la vie au Bataclan. La venue du chanteur anglais, qui avait foulé ces mêmes planches en 1979 avec Police, s'est décidée au dernier moment. C'est lui qui a proposé ses services. Des poids lourds du rock, le Boss notamment, avaient été approchés sans que les choses se concrétisent. Qui était le plus légitime pour jouer en premier dans la salle meurtrie? Les Eagles of Death Metal, devenus depuis le drame persona non grata ? Jesse Hughes, le chanteur, s'est rendu devant la salle mais n'est pas rentré.
  Un artiste français? On sait que Francis Cabrel a refusé de se produire. Peter Doherty, qui a fréquenté plusieurs fois le Bataclan et auquel le drame a inspiré la chanson Hell to pay at the gates of heavenqui figure sur son prochain album? Le chanteur des Libertines sera bien là.  
Il est programmé les 16 et 17 novembre. Jules Frutos, le codirecteur de la salle a expliqué il y a quelques jours qu' "il voulait absolument que la musique reprenne ses droits avant les commémorations du 13 novembre". Sting, qui a sorti son nouvel album, 57th & 9th, ce 11 novembre, s'est rendu disponible. 

 Par Julien Bordier

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