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Débats. Maroc-France, chronique d’une victoire annoncée

 

CHRONIQUE. D’Essaouira où il se trouve, le slameur Capitaine Alexandre, a choisi de partager ses déambulations, ses souvenirs, et sa joie à quelques heures du match.

Essaouira, il est 7 heures du matin.

Un coq chante au loin, la ville s'éveille doucement.

Je marche vers la place Moulay-Hassan encore déserte, elle sera ce soir rouge de monde portant les couleurs du pays à l'occasion du match tant attendu diffusé sur l'écran géant installé au cœur de la cité portuaire, depuis le début du Mondial au Qatar.

Le match ?

Maroc-France, les Lions de l'Atlas contre les coqs de l'Hexagone, l'Afrique contre l'Europe, le Sud contre le Nord, la rencontre est à la fois sportive et géopolitique pour certains. En terrasse hier, les commentaires allaient bon train, les pronostics aussi. « L'équipe marocaine porte les rêves de tout un continent », « quand un lion rugit, le coq s'enfuit », « il faudra faire attention quand même à Giroud et Mbappé, ne pas baisser la garde une seule seconde », « on va gagner deux buts à un, pour l'Afrique », « ça va se jouer aux pénos, mais on va gagner quand même et on battra l'Argentine de Messi aussi, après avoir battu le Portugal de Ronaldo et la France de Deschamps… »

Ferveur totale, absolue, populaire. Le pays est sur un nuage.

Symboliquement, les cartes sont redistribuées.

Et en fête, l'équipe du Maroc a déjà gagné.

Le respect et l'admiration du public, les amateurs et amatrices de football et les autres, toutes et tous saluent un parcours tressé de talent, de générosité et d'abnégation sur le terrain. Le Maroc est en demi, c'est la première fois qu'une équipe africaine atteint ce stade de la compétition, les joueurs habités et emmenés par leur merveilleux entraîneur Walid Regragui, ne sont pas allés au Qatar pour faire de la figuration, ils rêvent et se réalisent.

La victoire, finale, peut-être.

Leur coach l'a dit, répété plusieurs fois, « on a le droit de rêver » et c'est là toute la force de ce groupe à mon sens, le rêve, collectif et l'objectif, commun, faire rêver.

Le pays, le continent, le monde.

Je marche toujours dans les ruelles d'Essaouira, j'aime m'y perdre, et trouver sans l'avoir cherché, le chemin vers la mer.

J'avance vers elle, houleuse ce matin.

Le taros souffle une brise légère sur mon visage.

Je souris.

Des enfants jouent.

Mbappe vient d'égaliser après l'ouverture du score par Hakimi, Kylian et sa bande contre Achraf et la sienne.

Le premier pouvoir de l'enfance est le pouvoir du rêve.

Et ces gamins devant moi, sont véritablement ceux qu'ils rêvent d'être, dans l'instant présent.

Magie de l'imaginaire.

Je regarde Maroc-France sur une plage du bord du monde, à Mogador, caviar de Griezmann à Giroud, qui reprend de la tête et… Le bruit des vagues et le souffle du vent et le ciel et les oiseaux et l'amour.

Magie de l'imaginaire.

Ces garçons qui courent insouciants après un ballon rond comme la terre dont ils sont les fils, me rappellent Fred, Dex, Kouby, Achille, Christian et moi à leur âge, dans notre rue, à Bonapriso, à Douala, au Cameroun, nos petits goals sans fin et notre joie inaliénable. Nous étions Van Basten, Gullit, Rijkaard, Maradona, Milla, Omam-Biyik, et tous ceux qui nous faisaient rêver sur un terrain.

Magie de l'imaginaire.

Je regarde Maroc-France, sur une plage du bord du monde, à Mogador. Et ça joue, oui ça joue comme s'il y avait un enjeu, je veux dire un autre enjeu que le jeu lui-même, peut-être le « je » de vivre, vivre son enfance à sa bonne heure.

Bleue, comme une orange.

Je regarde Maroc-France sur une plage du bord du monde, à Mogador, et je souris à la puissance des rêves, à la magie de l'enfance, et à cette phrase-étincelle qui me traverse là, tout de suite, maintenant : aucun enfant n'est plus petit que son rêve. Aucun pays non plus.

Le message tremble de toute sa clarté, les peuples comme les êtres peuvent être, aussi grands que leurs rêves si seulement ils consentent à se hisser à leur hauteur et à s'habiller de leur étoffe sublime.

Par Marc Alexandre Oho Bambe*, à Essaouira - Le Point Afrique


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