Considéré comme moins exotique que le Levant et le Golfe par les diplomates et analystes, le Maghreb n’occupe pas la place qui lui revient dans la politique étrangère de la France.
Dans le rapport que nous publions avec l’Institut Montaigne Nouveau monde arabe, nouvelle “politique arabe” pour la France, nous avons analysé près de 600 jeux de données. Il en ressort une profonde imbrication entre le Maghreb et la France, plus forte qu’avec les autres zones de la région Afrique du Nord et Moyen-Orient.
Qu’est-ce que le Maghreb pour la France ? 80 % des franco-arabes, 85 % des francophones du monde arabe, 80 % des arrivées en France depuis la région, 40 % des échanges commerciaux : soit 50 % de plus qu’avec le Golfe. Le Maghreb c’est aussi 6 millions de Français qui ont un lien direct avec l’un des trois pays (immigrés, rapatriés). Enfin, malheureusement, 100 % des terroristes passés à l’acte ces dernières années en France sont Maghrébins ou d’origine maghrébine. Le Maghreb, plus que le Golfe, doit être la priorité stratégique de la France dans le monde arabe.
Notre avenir est forcément commun. Cessons de nous regarder en chiens de faïence !
Il est heureux qu’Emmanuel Macron ait affirmé devant les ambassadeurs français réunis à Paris ce mardi 29 août, que « le Maghreb restera une priorité centrale pour la France dans tous les domaines de notre coopération » ! Notre avenir est forcément commun. Cessons de nous regarder en chiens de faïence, sortons de cette relation passionnelle trop peu productive : construisons ensemble un avenir autour des chantiers prioritaires et stratégiques de part et d’autre de la Méditerranée.
La lutte contre le terrorisme est évidemment la priorité. Les pays du Maghreb sont autant que la France menacés par ce fléau. Le Maroc et la Tunisie ont fourni les plus gros contingents de combattants à l’État islamique. C’est pour cela que nous devons agir : en renforçant la coopération entre nos services, en évitant les brouilles qui augmentent notre vulnérabilité, en luttant contre l’exportation de l’idéologie salafiste, et en allouant des moyens aux programmes éducatifs et de sensibilisation, le cas échéant via l’aide publique au développement. C’est un combat de longue haleine, mais c’est un combat indispensable.
Le second défi est celui des migrations. La poussée démographique des pays d’Afrique subsaharienne, l’instabilité politique et économique, dans de trop nombreux pays, conduisent des milliers de personnes à prendre le chemin de l’Europe et de plus en plus du Maghreb, à la recherche d’une nouvelle vie. Tout l’enjeu réside dans notre capacité à prévenir et à contenir ces flux. Encore faut-il disposer des ressources humaines et financières pour contrôler des frontières aujourd’hui poreuses. La France et les pays de l’UE peuvent agir, à la condition de savoir être plus exigeants avec nos partenaires maghrébins, dans l’intérêt partagé de tous.
La Méditerranée occidentale doit devenir la priorité stratégique de la politique arabe de la France
Enfin, la France – avec ses partenaires du Sud de l’Europe – et les pays du Maghreb ont une co-prospérité à construire et à faire fructifier ensemble. En accroissant l’offre de formation dans les secteurs en expansion – et pas uniquement dans les formations d’excellence -, et en ne se contentant plus d’externaliser certaines productions mais en construisant de véritables stratégies au bénéfice de tous.
La Méditerranée occidentale doit devenir la priorité stratégique de la politique arabe de la France : il en va de sa sécurité, il en va de son avenir.
Par Hakim El Karoui/jeuneafrique.com
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