Dans un ouvrage cinéphile et passionné, Antoine Sire brosse le portrait de ces actrices hollywoodiennes qui ont su combattre le mâle.
Cinq ans de travail dont deux à temps plein, 1200 films visionnés, 1266 pages au garrot. Antoine Sire a véritablement payé de sa personne pour venir à bout de Hollywood, la cité des femmes, ouvrage cinéphile et historique, premier du genre, consacré aux actrices de l'âge d'or de l'usine à rêves, entre 1930 et 1955. Monroe, Kelly, Tierney, Garland, Hepburn, Gaynor, Faye ou Garbo, elles sont toutes là, et plus encore, dessinées en une plume sobre par un amoureux des aventures humaines.
"J'ai voulu réparer une injustice, souligne Antoine Sire. Derrière le glamour un peu superficiel entretenu par les studios, se cachent des femmes qui combattent les stéréotypes et cherchent la singularité. Leur féminisme n'est sans doute pas politique, mais il existe bel et bien."
En écho au combat actuel pour la parité
Dans son avant-propos, l'auteur trouve d'ailleurs une jolie formule pour évoquer ces actrices et, du coup, résumer l'ambition de son ouvrage: "Elles brillent en haut de l'affiche, mais elles travaillent au fond de la mine." De fait, ce livre s'échappe rapidement de la simple galerie de portraits pour raconter une époque, une industrie, une mythologie, mais aussi, et surtout, la façon dont toutes ces comédiennes, parfois devenues stars, ont réussi à s'imposer dans un univers essentiellement masculin.
Et, plus que s'imposer, à affirmer un statut professionnel et social autre que celui de simple faire-valoir. C'est d'ailleurs le paradoxe de Hollywood, hier comme aujourd'hui: considérer l'obligation de mettre en valeur les actrices et les personnages féminins et ne jamais les valoriser, quand ce n'est pas minimiser leur importance, voire le combat actuel pour une parité salariale.
Trois actrices à poigne
Trois d'entre elles, sont emblématiques de cet âge d'or, chacune ayant poussé le bouchon plus loin. Katharine Hepburn portait la culotte autant que ses partenaires masculins et endossait le rôle de la femme moderne. Barbara Stanwyck, pour laquelle Antoine Sire a une affection particulière, s'est affranchie des fanfreluches pour jouer les dures, les méchantes et les meneuses d'hommes - voir Quarante Tueurs.
Enfin, beaucoup moins connue aujourd'hui, Myrna Loy, plus de 120 films au compteur tout de même, actrice préférée des Américains dans les années 1930, a tranquillement secoué les habitudes sociales d'alors. Le couple qu'elle formait à l'écran avec William Powell - sexué, déluré, drôle, libre - a, selon Sire, "servi de modèle de complicité conjugale à des millions de ménages".
Ce n'est (heureusement) pas un dictionnaire que propose Antoine Sire, c'est un cri du coeur pour ces femmes qui ont su tordre la mythologie pour se faire entendre. Sacré boulot, Mesdames.
Par Eric Libiot/lexpress.fr
HOLLYWOOD, LA CITÉ DES FEMMES, par Antoine Sire. Institut Lumière/Actes Sud, 1266p., 59€.
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