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Le Grexit, occasion de rouvrir le chantier européen

Les difficultés de la Grèce peuvent marquer le début d'une nouvelle séquence : nous débarrasser des systèmes publics, et des responsables à bout de souffle !
Comme beaucoup de bourgeois, j'aime beaucoup les îles grecques, ces paradis blancs et bleus où le vent souffle sur une végétation sèche. J'aime l'antipathie des Grecs, qui marque leur fierté. J'aime leur nourriture simple, saine et répétitive, leur petit vin frais servi en carafe avec des verres de cantine, les chaises en paille et les nappes en papier de leurs restaurants. J'aime même la saleté d'Athènes, son laisser-aller et son atmosphère de violence. Du Pirée, cauchemar portuaire, je ne garde que des souvenirs heureux. La noblesse de la Grèce est dans les mémoires, dans la littérature mythologique, dans les livres d'histoire et sur les vases exposés sous verre dans les musées du monde entier. Elle est sur les rivages des Cyclades, sur la mer, sur l'or du soleil qui s'y reflète, au calme lointain et spartiate de maisons identiques qui forment ces paysages que tout le monde connaît. Voilà ma perception de touriste.
Il a manqué à l'Europe la volonté de s'assumer comme une puissance
Des tas de gens se bornent à répéter que "la Grèce est le berceau de la démocratie" et qu'à ce titre elle devrait rester membre de la zone euro, quoi qu'il en coûte. Comme si la zone euro avait réellement quelque chose à voir avec la démocratie, elle qui, comme l'Union européenne, a été bâtie par-dessus les peuples par une classe dirigeante qui croyait en son rêve. Les gouvernants européens savaient que l'État grec collectait difficilement l'impôt et qu'il truquait ses comptes, mais ils ont pensé que l'intégration continentale allait produire une sorte d'effet d'entraînement, apportant par magie la rigueur administrative, la responsabilité politique, le civisme, enfin tout ce qu'il faut pour faire un pays comme le Danemark. Les Grecs n'ont pas fait les réformes qu'ils n'avaient de toute façon que vaguement promises, mais se sont servis de la solidarité et de la solidité européennes pour emprunter au-dessus de leurs moyens. Les voilà aujourd'hui en faillite. Encore une fois, il a manqué à l'Europe la volonté de s'assumer comme une puissance : limitée à un agrégat de nations liées par quelques traités, actionnée par des institutions inutilement lourdes, opaques et sans légitimité forte, circonscrite à quelques domaines très techniques, l'Union européenne est en train de se désagréger.
Recentrer l'UE sur ses pays forts
On peut objecter qu'il en va de l'UE comme naguère de l'URSS dont on disait que si ça ne marchait pas, c'est qu'il en fallait plus et que ça finirait bien par marcher un jour à force d'en rajouter, raisonnement, il est vrai, un peu fou. Il ne faut pas plus d'Union européenne telle qu'elle meurt, il faut en faire une nouvelle et, de ce point de vue, le Grexit peut marquer le début d'une nouvelle séquence. Cela fait des siècles que l'Europe enfante des génies et des merveilles. Nous sommes la plus grande civilisation du monde. Or, aujourd'hui, nous dormons debout et l'élite de notre jeunesse émigre vers des terres plus prometteuses. Tout montre qu'il faut une Europe forte : pour gérer les flux migratoires, par exemple. Le moment est venu de recentrer l'UE sur ses pays forts, d'en affirmer clairement les valeurs et l'enracinement, et de les doter d'un gouvernement élu au suffrage universel direct. Les systèmes publics, et leurs responsables, sont à bout de souffle dans la plupart de nos pays : l'occasion de nous en débarrasser pour faire du neuf est entre nos mains. Nous avons un projet politique entre les mains, un vrai but pour les nouvelles générations, autre chose que leur petit bien-être capturé sur Instagram, autre chose que la burqa, autre chose que des manifs contre les homosexuels et autre chose que des luttes contre des fascismes imaginaires, qui ne deviendront réels que par notre inaction.
Par Charles Consigny 

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